Je viens juste de finir"So Young But So Cold" sorti chez Camion Blanc.
On va commencer par le "j'aime pas" et garder le meilleur pour la fin :
1/ Au vu de la carrière météorique du groupe (seulement trois albums en moins de 10 ans) on peut comprendre qu'il faille écrire gros pour justifier le prix (28€) mais on a un peu l'impression de se faire agresser le fondement à sec avec une volée de gravier, et ça n'est pas rattrapé par le
2/ la qualité des photos qui fait aussi lourdement défaut... on dirait parfois des images photographiées avec une vilaine webcam de marque albanaise dans un sous-sol de métro pendant la pause déjeuner.
Quand on est amoureux de Kas Product comme moi ça peut laisser pantois.
MAIS
Le livre est fait avec amour, ça se sent, et de l'enthousiasme à revendre et ça fait bien plaisir.
On se surprend aussi à exulter quand l'auteur fait le parallèle avec le Yin et le Yang : Mona chaude et sensuelle contraste Spatsz concentré et studieux, plus dead serious on ne fait pas.
On a droit à une analyse mettant en lumière la difficulté de se produire en live, la présence de grilles entre eux et le public se justifiant par l'envoi de projectiles sur la scène, aux débuts du groupe semple t-il.
Mona Soyoc est décrite comme une icône chaudasse mais féministe, on sent que l'auteur fantasme sur la Dame autant que la majeure partie masculine du public de Kas... et pourquoi pas d'ailleurs ?
Certain journaux les emmènent très loin en qualifiant la musique du duo de réellement originale et en décalage par rapport au modèle anglo saxon en vigueur même dans la musique électronique d'avant garde-pop de l'époque.
Je fus par contre atterré par l'opposition artificielle -malheureuse- que propose le narrateur : Kas Product "intègres" contre le côté supposé "plastique" de OMD ou Human League... merde, P. Gillieth a dû rater les albums "Reproduction" ou "Travelogue", les quatre premiers de OMD qui ne sont pas dénués d'expérimentations...
Si justement on pouvait faire un parallèle avec d'autre groupes sans vouloir trop se fouler ça serait bien ceux-là, deux groupes qui ont connu deux périodes distinctes, l'une expérimentale aux accents limites industriels avec des vieux synthés analos programmés à l'arrache (pas de PC ou de Mac à l'époque: la préhistoire, quoi) et une autre avec des tubes pop débridés (mais de ce côté là Kas c'est complètement planté en s'essayant à des trucs plus pop.. tant mieux d'ailleurs) le seul fil conducteur étant un certain héritage Soul.
Tout les ingrédients sont présents : Musique "européenne" libérée du carcan musical des states, la soul (je dirais tout simplement un sens inné du groove avec un grand G) voilà ce qui fait de Kas Product les héritiers les plus inventifs de la musique "post-bowie" (le "vrai", celui d'avant Let's Dance) de la vague "cold wave" française.
Par le biais de ce (bon) bouquin, le duo nancéen se voit donc propulsé au rang de "pionniers" ce qui est probablement vrai même si la formule du duo "chanteur/chanteuse" charistmatique et androgyne + intello glacial aux manettes n'est pas nouvelle depuis les Sparks, Eurythmics ou Soft Cell; mais un truc me chagrine toujours avec le terme "pionnier" car il traine toujours derrière lui cette clique d'Ayatollahs de la VRAIE cold prêchant le synthé ANALO et le disque VINYL à l'exclusion du reste (comprendre par-là tout ce qui dépasse 1989), le genre d'intégrité "clés en mains", une mode qui est particulièrement ridicule en plus d'avoir la prodigieuse capacité de me filer des boutons.
C'est particulièrement irritant quand on sait que le public français est depuis toujours relativement attentiste (comme la majorité des gens pendant l'occupation par exemple) et j'aime quand l'auteur remet les pendules à l'heure en citant l'interview de Spatsz qui déclare ne pas être à l'origine de cette vague "rétro". Le même Spatsz qui déclare ne pas se servir exclusivement de matériel analo qui n'était forcément fiable à 100% à l'époque : on imagine maintenant) lors des lives de la reformation en 2005 et toc!
So Young But So Cold dessine donc en creux les limites du ridicule de l'engagement rigide de jeunes fraichement convaincus ne jurant que par le old school (pour qui ont pourrait ressortir une ligne de sous-vêtements Damart typiques de l'époque ou des DVD d'Yves Mourousi ou Guy Lux... quitte a faire "vrai") et rappelle que les contemporains de Kas se nommaient Béru, OTH ou autres "alternatifs" même si Kas product ne ressemble à rien d'autre, que les débuts de Spatsz et Mona se firent sous le règne de l'autoprod' et du système D, bricolo en diable qui donne encore tant de charme à By Pass et Try Out et toute une flopée de maxis géniaux.
L'auteur rappelle aussi que les premiers live ne comportaient qu'un public clairsemé même si la presse musical les a rapidement encouragés... ça laisse rêveur.
Et nous voilà en 2010, la musique peut se faire avec des ordis et DIEU MERCI il y a plus de choix dans les fringues... la créativité n'est donc pas synonyme de gros matos (encore heureux).
Le côté vestimentaire n'est pas anodin car le duo recevait semble t-il des noms d'oiseaux visant leur aspect "bizarre" : tant que le simple fait d'avoir "l'air différent" fera jaser les philistins les actuels dandys "goth" ou "dark" -qui sont de lointains descendants de Kas Product- auront une raison d'être, on voudrait juste qu'ils écoutent un peu plus la musique de leurs "ancêtres" et heureusement la portion la plus "curieuse musicalement" de ceux-là ne demandent qu'à découvrir de tels groupes actuellement.
Je conclurais en disant que la bonne musique ne vieillit pas.
(Alors on écoute les vieux groupes, s'il vous plaît, jeunes padawans)
http://www.myspace.com/kasproduct
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire